René Landais naquit à Paris, rue Vercingétorix,
dans le quartier ouvrier de Plaisance. Son père, Jules, Gabriel
Landais était ouvrier imprimeur qualifié, d’ «
opinions de gauche », anticlérical (il ne fit pas baptiser
ses enfants), très cultivé. Né à Paris,
ses parents étaient originaires de la Mayenne. Le grand-père
paternel de René Landais était un ardoisier de Trélazé.
Sa mère, Aline Duveau était couturière, originaire
des Charentes. Divorcée, elle s’était installée
à Paris où elle avait épousé Jules Landais.
Iles eurent trois enfants, deux filles et un garçon. René
était le dernier de la fratrie. René Landais, orphelin
de père à l’âge de cinq ans, fut élevé
par sa grand-mère maternelle, une blanchisseuse charentaise.
Il fréquenta un patronage catholique, rue Colas. Il s’y
initia à divers sports. Il obtint le Certificat d’études
à douze ans et entra comme apprenti en sièges de style
chez un artisan du faubourg Saint-Antoine. Il se souvient avoir alors
fréquenté assidûment la bibliothèque municipale
du XIVe arr. Et lu Émile Zola, Romain Rolland, Henri Barbusse,
Roland Dorgelès, Andréas Latzko, Anatole France. Alors
que sa mère eût préféré qu’il
préparât une carrière d’employé,
il était désireux de faire un apprentissage d’ébéniste.
Il obtint gain de cause et trouva, le 18 octobre 1920, une place chez
Colombain, un ébéniste de la rue Godefroy Cavaignac.
Un ouvrier, petit-fils de communard, lui conseilla des livres, comme
L’Apprentie de Gustave Geoffroy. Cet ouvrier était
favorable à l’adhésion à l’Internationale
communiste. Mais René Landais mécontent de ses conditions
d’apprentissage et de rémunération, quitta l’ébénisterie
le 17 août 1921 et consentit, sans enthousiasme, de passer le
concours d’entrée au Crédit lyonnais. Entre temps,
du 22 octobre 1921 au 31 janvier 1922, il fut employé de bureau
dans un chocolaterie de Montrouge, puis, pendant la première
quinzaine de 1922 dans une tonnellerie du IVe arrondissement. Reçu
au concours du Crédit lyonnais, il travailla d’abord
, à compter du 15 février 1922, comme « grouillot
» au siège central, au service des Positions-Banque.
Puis, reçu troisième au « grand concours »,
devint employé « à part entière ».
Installé à Montmartre, il menait une vie de Bohème
avec des collègues de travail devenus ses amis. En 1924, il
participa à des manifestations du Parti communiste et adhéra
à la CGTU. Mais, passionné par la lecture, le dessin,
la musique, le théâtre, les voyages et les sports (le
rugby et le tennis, en particulier), il hésitait encore à
adhérer au PC, car, écrivit-il plus tard dans son autobiographie,
« je pensais qu’un militant devait se consacrer corps
et âme à l’action. je ne pouvais donc pas encore
faire le saut ... ».
René Landais participa activement à la grève
unitaire des banques de 1925 qui se solda par un cuisant échec.
Il fut, le 15 février 1925, renvoyé comme « meneur
». Un marchand de tissus de la rue d’Aboukir l’embaucha
un temps comme facturier (de septembre 1925 à juillet 1926).
Mais, écrit-il dans le document autobiographique qu’il
nous a communiqué, « je décidai de devenir paysan
». Ouvrier agricole à Fontclaireau (Charente) commune
d’origine de sa grand-mère maternelle et où il
s’était rendu, auparavant, pendant les vacances) du début
de juillet à septembre 1926, il ne revint à Paris au
bout de trois mois que sur les instances de sa mère et de sa
soeur qui vint le chercher. Il serait, quant à lui, resté
à la campagne où il s’épanouissait car
il adorait les travaux champêtres et l’ambiance villageoise.
Il travailla ensuite, du 9 septembre 1926 au 7 avril 1927, comme pointeau
payeurcomptable chez Hotchkiss à Levallois-Perret. Pratiquant
assidûment divers sports, il fréquentait aussi les théâtres
et les cinémas et lisait toujours autant : « Nous accédions
à la culture, et c’était très rare dans
les milieux pauvres des salariés », remarque-t-il dans
son autobiographie. L’année suivante, le 4 mai 1927,
l’Armée l’appela pour le service militaire à
Mayence (510e RCC). Il refusa de faire partie du peloton des élèves
sous-officiers. Il apprécia l’hospitalité des
Rhénans et s’il était antimilitariste, il devint
« aussi internationaliste. Suspecté de sympathies communistes,
il fut sévèrement puni et termina son service dans un
régiment d’infanterie. Libéré de ses obligations
militaires au début octobre 1928, il retrouva dès le
8 de ce mois son emploi chez chez Hotchkiss. Il adhéra à
la cellule communiste de l’entreprise en septembre 1929 et suivit
l’école de rayon animée par Pierre-Laurent Darnar
(Voir Laurent Pierre). Une enquête patronale provoqua son renvoi
le 20 février 1931. C’est pendant une période
de chômage – il militait au PC, toujours à Levallois-Perret
– qu’il participa, en 1931, à l’école
régionale communiste. Au chômage, il adhérait
toujours au syndicat des employés comptables et fut un temps
membre de sa commission exécutive. Ce furent ses camarades
du syndicat qui lui proposèrent un emploi de caissier comptable
à La Bellevilloise
coopérative ouvrière de consommation à direction
communiste. René Landais travailla à La Bellevilloise,
du 8 mai 1931 à sa faillite le 6 juin 1934. Il militait à
une cellule d’entreprise Vaucanson du XXe arrondissement, rattachée
au 2e rayon, fut membre de la commission exécutive du syndicat
les employés de la coopérative et un adhérent
très actif du Club sportif des employés, section tennis,
affilié à la Fédération sportive du travail.
Tennisman de bon niveau (champion de France 3e catégorie),
il se rendit à la Spartakiade illégale de Berlin en
1932. À la même époque, il eut une liaison avec
une Polonaise juive, militante dans les milieux de l’émigration
qui avait étudié à Sciences politiques, Reine
Gurfinkiel* (1909-1973). Il se maria avec elle en mai 1932. Ce mariage
était, écrivit-il plus tard, un « mariage blanc
». Toutefois, ils vécurent plusieurs mois ensemble. Mais
après que Reine Gurfinkiel eut quitté la Bellevilloise
pour la Grange aux Belles, et un dernier voyage romantique à
Majorque, ils se séparèrent. Ils divorcèrent
en juillet 1939. René Landais réussit à parfaire
encore sa formation intellectuelle grâce à des contacts
noués dans le cadre du PC. Il consacra ses vacances à
de longs voyages. Mais il vécut intensément les mois
qui préparèrent la constitution du front populaire.
Il participa aux manifestations parisiennes des 9 et 12 février
1934 avec ses camarades du 2e rayon. Après la faillite de La
Bellevilloise, René Landais fut dans l’impossibilité
de trouver du travail. Il partit un temps dans l’Yonne où
il noua des contacts amicaux et militants. Puis, de retour dans le
XIVe arr., il fut l’un des secrétaires de la section
communiste aux côtés de Raymond Losserand. Il retrouva,
le 18 juillet 1935, un emploi d’aide comptable à la direction
de la Fédération des transports de la CGTU. Il assista
plus particulièrement les responsables du Syndicat des chauffeurs
camionneurs de Paris dont les effectifs augmentèrent rapidement
à la faveur de la dynamique unitaire du rassemblement populaire.
Au chômage du 30 avril 1936 au 30 août 1936, il retrouva
ses fonctions de permanent syndical au syndicat des chauffeurs.
Suivant de près la guerre civile espagnole, il se décida
à franchir le pas. Il s’engagea dans les Brigades internationales
le 17 février 1937 et partit de Paris avec trente-trois Parisiens
du XIVe arrondissement, parmi lesquels un de ses amis, Henri Tanguy*
[Rol Tanguy]. Le 17 février 1937, il s’engagea comme
volontaire dans les Brigades internationales en Espagne républicaine.
Il franchit la frontière avant que celle-ci ne fût définitivement
fermée, le 28, aux volontaires. Leur groupe fut réuni
à d’autres volontaires au fort de Figueres qui, après
un court séjour à Barcelone, gagna Albacete par train.
René Landais fut affecté comme commissaire politique
à l’état major des Brigades internationales. Pendant
longtemps, on lui refusa une affectation au front. Il fut chargé
depuis Albacete de diverses missions en Andalousie, puis de la réception
d’un délégation du Front populaire français
qu’il conduisit dans diverses localités du Pays valencien.
À Albacete, Maurice Lampe* fit de René Landais le commissaire
politique adjoint de la base des brigades internationales. André
Marty* le prit sous sa protection. Pourtant, René Landais n’appréciait
guère « son caractère brutal et odieux »
tout en soulignant qu’il ne pouvait « laisser dire qu’il
fut le ‘‘ boucher d’Albacete’’ ».
C’est à la base d’Albacete qu’il fit la connaissance
d’une dactylo, Georgette Clerc*, et que commença la liaison
qu’il eut avec elle. En mars 1938, lors de l’offensive
des forces franquistes en Aragon qui coupa la zone républicaine
en deux, Landais reçut l’ordre d’évacuer
par camion la bibliothèque et les dossiers des Brigades d’Albacete
à Barcelone. Il s’acquitta de cette mission, accompagné
par Georgette Clerc, avec qui il vivait maritalement, et Adèle
Arranz*. À Barcelone, Landais fut affecté auprès
de Gallo, inspecteur des Brigades. Il fit des démarches pour
rejoindre enfin le front. Il fut détaché à la
14e brigade internationale en position sur le front stabilisé
depuis mars sur la rive gauche de l’Èbre. Il y retrouva
des amis (Henri Tanguy, Roger Codou*, Marcel Sagnier). Lorsqu’il
arriva sur le front la bataille de l’Èbre était
commencé et la 14e brigade avait été décimée
dans une opération de diversion de franchissement du fleuve
à Campredó, au sud du dispositif républicain
près d’Amposta. René Landais, affecté au
commissariat politique de la brigade, participa à la suite
de la bataille de l’Èbre, particulièrement aux
longs et durs combats de tranchées de la serra de Cavalls.
Pendant, la bataille, il lisait L’Espoir d’André
Malraux que « Régine » [Reine Gurfinkiel] lui avait
fait parvenir.
Après le retrait des Brigades internationales du front décidé
par Negrín président du Conseil (21 septembre 1938),
il fut chargé de regrouper les Internationaux à Calella,
port de pêche de la Costa Brava. Après le défilé
d’adieu aux brigadistes à Barcelone, il rentra en France
avec un convoi qui les conduisit à Paris-Austerlitz. Quelques
jours après, Georgette Clerc les rejoignit. Ils retournèrent
à Perpignan. Penadant un séjour à Mérens-les-Vals
(Ariège), ils se rendirent en Cerdagne, à Saillagouse,
dans la famille de Georgette. C’était le premier vrai
contact de Landais avec les Pyrénées-Orientales (Voir
Cayrol Antoine). De retour à Paris, au début de 1939,
René Landais fut désigné le 15 janvier 1939 par
le Parti communiste comme permanent au Comité de coordination
des réfugiés espagnols –il le demeura jusqu’au
18 mai 1939– et le fit coopter au comité de la Région
communiste Paris-Ville. Il devait également travailler avec
André Marty* et Tanguy à la rédaction d’une
histoire des Brigades internationales mais, en accord avec un responsable
aux cadres (Félix Cadras), il partit, le 18 mai, s’embaucher
dans l’Yonne chez René Berthaud, un petit patron communiste
d’Auxerre. Il entra au comité fédéral.
Après la signature du Pacte germano-soviétique, la direction
communiste de l’Yonne l’envoya à Paris prendre
des directives. Léon Mauvais* lui déclara qu’il
fallait « faire confiance à l’URSS ». Il
participa à la confection d’un journal qui fut diffusé
dans l’Yonne début septembre 1939. Il fut mobilisé
le 6 septembre, alors que Georgette Clerc était enceinte. Sa
première femme avait entamé une procédure de
divorce. Il put se marier avec Georgette Clerc à Auxerre le
23 avril 1940, lors d’une permission exceptionnelle de trois
jours. Entre-temps, sa fille Renée était née
le 8 janvier 1940. De Fontainebleau, il fut affecté au front,
dans les Ardennes, près de Carignan, dans une unité,
le 246e RI, où se retrouvaient nombre de « suspects »
politiques, chargés de creuser des tranchées et de construire
des blockhaus. Lors de l’attaque allemande, en mai 1940, René
Landais se trouvait en retrait du front, près de Vouziers (Ardennes).
Son unité fit mouvement vers le confluent de la Meuse et du
Chiers. Il fut fait prisonnier près de Raucourt (Ardennes).
Il fut tout d’abord transféré dans une ferme d’État
à Deutsche Krone (aujourd’hui Walcz, dans la partie de
la Poméranie annexée à la Pologne en 1945), puis
au stalag II-A d’Hammerstein en Poméranie (aujourd’hui
Czarne en Pologne) ; au stalag II-B de Neubrandenburg (aujourd’hui
dans le land de Mecklembourg – Poméranie occidentale,
Allemagne) dans divers commandos dont celui de Stettin (aujourd’hui
Szczecin, Pologne) ; à Brême ; à Emden, près
de la frontière hollandaise ; à Vegesack, près
de Brême, où il apprit la défaite allemande de
Stalingrad et où il fut membre d’une organisation communiste
clandestine ; à Westetimke (Basse Saxe) dans un ancien oflag
britannique où il participa à la reconstitution d’une
cellule du PC français et où, le 24 avril 1945, au moment
de la libération du camp, il fut élu secrétaire
d’une amicale des PG du 2e arbeitsbatallon du camp. René
Landais tenta en vain deux évasions, depuis une forêt
près de Stettin et à Emden. Il réussit cependant
à constituer des noyaux communistes dans les camps. Il rejoignit
sa femme à Orléans (Loiret). Tous deux décidèrent
de se fixer à Saillagouse, dans les Pyrénées-Orientales
où sa femme avait des attaches familiales. En juillet et août
1945, il travailla à Olette (Pyrénées-Orientales)
comme auxiliaire des Ponts-et-Chaussées. À partir du
27 juillet, il travailla comme ouvrier spécialiste à
la THEG, entreprise de travaux publics chargé de rehausser
et de renforcer la digue du barrage des Bouillouses, à plus
de 2000 m d’altitude, construit en 1910. La THEG travaillait
comme prestataire de service pour le compte de la SHEM (société
hydro-électrique du Midi), filiale de la SNCF et propriétaire
de l’ouvrage. Les conditions de travail étaient dures
et il ne revenait que le samedi soir chez lui à Saillagouse.
De plus , les travaux étaient suspendus pendant l’hiver.
Il participa activement à la mise en route d’une section
syndicale, fut élu délégué du personnel
puis responsable du comité d’entreprise. Il participa
également à la mise place de trois cellules communistes
d’entreprise aux Bouillouses, du PCF, du PCE et du PSUC (Parti
socialiste unifié de Catalogne). Il réussit à
faire améliorer les conditions de travail des ouvriers et à
obtenir, avec l’appui du député communiste André
Tourné*, que, pendant l’hiver, alors que le chantier
des Bouillouses était fermé, ils fussent employés
à des travaux de réfection du canal d’irrigation
de Bohère, près de Villefranche-de-Conflent, dans la
commune de Ria-Sirach (Pyrénées-Orientales). L’été
suivant il revint travailler aux Bouillouses. Dans le même temps,
il participa activement à la vie du PCF de la Cerdagne et du
Capcir, assurant l’organisation de la propagande pendant l’élection
cantonale des 23 et 30 septembre 1945 dans le canton de Mont-Louis
–où le candidat communiste, François Rouquet*,
maire de Fontpédrouse, fut devancé par le socialiste
SFIO Charles Bourrat* élu au second tour– et pendant
les élections législatives du 21 octobre 1945. À
propos de ce scrutin, il écrivit en 1978 dans son autobiographie
inédite : « Jamais les paysans catalans [de Cerdagne
et du Capcir] assister si nombreux aux réunions du Parti communiste,
c’est un grand succès pour notre camarade André
Tourné (...) élu député à une large
majorité ». Délégué de la section
de Mont-Louis du PCF à la conférence fédérale
de Perpignan (1946), il fut élu au comité fédéral.
Le chantier des Bouillouses s’acheva à l’automne
1946 et, le23 novembre, il dut trouver un nouvel emploi. Il fut embauché
le 5 décembre 1946, sur un chantier à Olette (Pyrénées-Orientales)
où l’entreprise Ségrette de Toulouse construisait
une petite centrale électrique pour le compte de la SHER. Sa
famille déménagea à Catllar (Pyrénées-Orientales,
près de Prades, où il avait trouvé une maison
à louer. Peu de temps après son fils Pierre naquit en
février 1947. Les responsables départementaux de la
CGT lui demandèrent d’assurer la direction du centre
de formation professionnelle accélérée du Bâtiment
qui venait d’ouvrir dans un « îlot » disponible
du camp de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales). Il prit
ses nouvelles fonctions de directeur le 15 janvier 1947. Quelques
mois plus tard, sa famille vint s’installer au CFA de Rivesaltes
où un logement de fonction a été aménagé.
Mais la localisation du CFA, dans un lieu inhospitalier éloigné
de l’agglomération de Rivesaltes amena incita sa femme
à revenir à Catllar où lui-même ne revenait
que le samedi. Landais défendait systématiquement les
revendications des stagiaires du centre qu’il dirigeait, ce
qui indisposait les patrons. Il encouragea les stagiaires à
participer à la grève du Bâtiment de 1949. Ce
fut le motif qui conduisit, finalement à son licenciement par
le ministre du Travail, Daniel Mayer*, à compter du 27 juillet
1949. De retour à Catllar, il chercha un emploi et réussit
à se faire embaucher, le 1er décembre 1949, chez Deixonne,
une entreprise du Bâtiment de Prades. Il y travailla un mois
, puis à compter du 1er janvier 1950 et jusqu’au 15 mai,
il fut embauché chez Léon Fabre, à Prades pour
la construction d’un pont canal, puis, après ce chantier,
par un parent et homonyme de Fabre. À la fin de 1949, il loua,
avec sa femme, une petite maison avec un jardin à Eus, un village
voisin. Plus tard, ils y acquirent une maison en ruines qu’ils
réhabilitèrent. À Eus, René Landais mena
avec sa femme et ses enfants « une vie dure et rustique mais
très saine ». Ayant peu de ressources, ils devinrent
« végétariens par force ». Amoureux de la
nature, ils lurent les livres des Américains Herbert McGolfin
Shelton (1895-1985), adepte du naturisme et du végétarisme
et de Rachel Louise Carson (1907-1964), biologiste qui dénonça
l’utilisation des pesticides et leur nocivité sur le
fonctionnement des écosystèmes. Quelque part, René
Landais et Georgette Clerc donnaient raison par leur style de vie
par le manque de ressources financières, en partie contraint,
aux « premiers naturistes et écologistes » dont
il estimait, en 1978, qu’ils faisaient partie après la
lecture de ces deux auteurs. Le 20 mai 1950, il fut embauché
comme comptable chez Jaulent, épicier en gros à Perpignan.
Il y travailla jusqu’à ce qu’il fit valoir ses
droits à la retraite, le 18 avril 1969. Dans un premier temps,
il continua de résider à Eus ce qui impliquait plus
de deux heures de trajet quotidien pour se rendre à son travail.
Son militantisme fut de ce fait réduit à la participation
aux campagnes électorales et à la vente du Travailleur
catalan. Puis il déménagea à Perpignan,
ou, pendant quelque temps, à proximité, à Canet-Plage.
À Perpignan, il milita avec sa femme à la celle «
Gabriel Hispa » du quartier Saint-Mathieu. Après son
licenciement de la direction du CFA de Rivesaltes, il avait demandé
à être déchargé de ses responsabilités
au comité fédéral. Mais comme il l’écrivit
plus tard, il n’a « jamais eu d’ambition dans le
Parti » où il avait « constaté des signes
de bureaucratie et beaucoup d’obséquiosité de
la part de certains militants envers les dirigeants (ce qui n’existait
pas dans le PC de l’entre deux guerres) » et était
« très gêné par certaines formulations :
notre grand camarade Maurice Thorez, notre grand camarade André
Marty, etc ... ». Il fit part de ses doutes à Antoine
Cayrol, cousin germain de sa femme, mais ils pensaient tous deux que
ces défauts pourraient être « rectifiés
». Lui-même continua à militer avec ardeur dans
sa cellule. Mais délégué à une conférence
fédérale, René Landais fut révolté
par un fonctionnement qui, selon lui, n’avait rien à
voir avec le « centralisme démocratique ». Pour
l’heure, il accepta la proposition du représentant du
comité central, Gabriel Roucaute qui proposa que sa femme fût
élue au comité fédéral, alors que sa cellule
qui avait critiqué la direction fédérale, avait
présenté publiquement la sienne. Après avoir
déménagé dans une HLM neuve du Moyen Vernet,
il milita à la section de Perpignan Nord, et, avec sa femme,
constituèrent la cellule d’un quartier en pleine expansion,
animant un comité de locataires des HLM. Élu trésorier
puis secrétaire de la section de Perpignan Nord, il participa
aux campagnes des élections cantonales (octobre 1951) et municipales
(avril-mai 1953), milita au CNAL et fut élu (CGT) pour un mandat
de six ans à la Caisse départementale d’allocations
familiales des Pyrénées- Orientales. Le 6 mars 1959,
René Landais fut candidat au premier tour des élections
municipales à Perpignan sur la liste d’Union ouvrière
et démocratique présentée par le PCF et conduite
par Raoul Vignettes*. Il obtint 7632 voix sur 27 693 votants. Il ne
fut pas présent au second tour sur la liste conduite par le
maire sortant, Félix Depardon*, issue de la fusion entre les
listes du PCF, de l’URD (PSA, UGS, UP, Ligue des droits de l’homme
et une partie de la SFIO). Le rapport de Khrouchtchev au 20e congrès
du PCUS l’ébranla mais ne fit que confirmer quelques-uns
des doutes qui le taraudaient. Au fil des ans, il eut un regard de
plus en plus critique sur le PCF, sa politique et ses modes de fonctionnement.
Il rompit avec le Parti, en même temps que sa femme, après
l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du Pacte
de Varsovie en août 1968. Cette rupture, préparée
par une longue réflexion et des lectures « hétérodoxes
» au regard des normes officielles du parti fut vécue
comme un drame. La découverte du court roman d’Alexandre
Soljenitsyne, Une journée d’Ivan Denissovitch,
acheva de détruire définitivement ses illusions sur
le modèle soviétique. Après son départ
à la retraite, il s’installa avec sa femme à Eus
dans la maison qu’ils avaient restaurée au début
des années 1950. Ils la vendirent ensuite pour s’installer
à Lescurat (Dordogne). Mais ils se séparèrent
de corps (décision du tribunal de Périgueux du 13 décembre
1977). Après cette séparation, il s’installa à
Thuir (Pyrénées-Orientales) où vivait sa fille
Renée, PEGC au collège Pierre-Moreto de Thuir (dont
le mari, également PEGC, René Olive, militant du PS,
devint maire de la ville et conseiller général du canton,
mandats qu’il détient toujours en 2011). Peu après,
en 1978, il écrivit une longue autobiographie dont ne subsiste
plus que 127 feuillets dactylographiés, s’arrêtant
en 1956, le reste étant perdu. Il rédigea ce texte à
l’intention d’ « étudiants révolutionnaires
» (principalement ses neveux parisiens, d’après
Mme Renée Olive). En effet, les premières années
de cette nouvelle phase de son existence, il passait une partie de
l’année à Paris, chez sa soeur. Au début
des années 1980, il participa à une émission
d’une radio associative d’extrême gauche parisienne
à laquelle il donna une longue interview. À Thuir, il
mena une existence solitaire, consacrant beaucoup de temps à
la lecture, une de ses grandes passions. Diminué et fatigué,
il entra en 1992 dans une maison de retraite de Thuir où il
mourut dix ans plus tard.
OEUVRE
: Une autobiographie sans titre, tapuscrit incomplet de 127 p. écrite
en 1978, à « la demande d’étudiants en sociologie,
n’étant d’aucun parti mais étant situés
à l’extrême-gauche, de pensée révolutionnaire
». (Arch. privées André Balent). — Des éléments
autobiographiques dans une émission sur une radio « libre
» militante parisienne (début des années 1980).
SOURCES :
Arch. privées Renée Olive, fille de René Landais,
Thuir. — Tapuscrit autobiographique, op. cit., [1978]. —Témoignage
autobiographique, mai 1983. — Rémi Skoutelsky, L’espoir
guidait leur pas. Les volontaires français dans les brigades
internationales, Paris, Grasset, 1998, pp. 165-166. — Entretien
avec René Landais (Claude Pennetier). — Entretiens avec
Renée Olive, fille de rené Landais, Thuir, 11 septembre
2001, 27 avril 2011 (André Balent). — Entretiens avec
Antoine Cayrol*, cousin par alliance de René Landais, Saillagouse,
1er septembre 2001, 12 juillet 2004 (André Balent). —L’Indépendant,
février-mars 1959, en particulier le n° du 20 mars 1959.
— Le Monde, 18 avril 1986. — RGASPI, 495 270
5067, dossier biographique pas encore consulté.
André
BALENT, Claude PENNETIER